Interview de Sylvestre Orange, arbre fruitier d’Arcadia, par notre envoyé spécial Raphaël Yves-Marie.
RYM> Alors M. Orange, comment trouvez-vous la terre où vous habitez ?
S> Vous savez, par nature, je préfère la terre légère et légèrement acide, alors qu’ici elle est plutôt lourde et calcaire. Mais on ne choisit pas ses racines ; il faut bien faire avec ce qu’on a, alors autant le faire dans la bonne humeur. Je me suis adapté.
RYM> Est-ce votre terre natale ?
S> Non, je suis né en Corse [en 1985], je dois dire que la terre y était meilleure, elle avait un bon petit goût acidulé. Plus tard je suis venu me planter à Vallauris [en 1988]. Même si la terre est un peu moins bonne, même si l’hiver il fait un peu plus frisquet ici, je ne regrette pas d’avoir déménagé, l’endroit est ensoleillé, calme et tranquille. Il n’y a pas trop de cailloux dans la terre. Et on est bien considérés.
RYM> Et donc au sujet de l’entretien de cette terre par les propriétaires ?
S> Moi et mes collègues sommes totalement satisfaits. Avant [2008], on pouvait se plaindre de l’odeur du motoculteur, qui de plus nous faisait quelque peu mal aux cheveux, mais depuis que l’on nous fournit du BRF, il n’y a plus rien à dire. Le motoculteur n’a plus droit de cité au verger. Solution bio, nos petites branches nous disent que nous sommes un peu des privilégiés.
RYM> Je vois que vous êtes bien entouré, c’est votre famille ?
S> Oui, je la considère comme telle en tout cas. Après tout, on fait le même métier, on vit ensemble toute l’année, forcément, ça crée des liens.
RYM> Quelques commentaires sur le climat ?
S> Chaud, et sec. Ici on est plutôt protégés du vent. De toute façon, il n’y en a pas beaucoup. Il pleut rarement en été, parfois on tire la langue, et notre cultivateur est un peu radin, il nous arrose au compte-gouttes.
RYM> Au sujet de la taille, des commentaires ?
S> Sa coupe est toujours parfaite, mais on aimerait parfois un peu plus de fantaisie ; hier encore, il m’a refusé l’iroquoise, et Silvy là-bas rêve d’avoir le feuillage long.
RYM> Vous recevez beaucoup de visites, des insectes, des animaux ?
S> Oui, j’ai même des locataires à demeure, il faut dire que les loyers sont très modérés. Beaucoup d’insectes habitent chez moi, et aussi des araignées de toutes tailles. Les abeilles viennent me rendre visite surtout en mai, quand j’ai mes fleurs ; bien sûr, ce sont des visites intéressées, mais j’aime bien leurs chatouilles. J’en ai même eu un essaim l’année dernière. Mon cultivateur l’a repéré, et remis dans une ruche. Des oiseaux aussi viennent me voir ; les rouges-gorges sont si adorables, toujours prêts à rendre service, que je leur pardonne volontiers de me croquer parfois un locataire ou deux.. J’aime moins les pies et les pigeons, trop lourds, ils me tordent les branches. Et si ces primo-arrivants, ces espèces de pseudo-écureuils d’importation sont des plaies, il en vient beaucoup moins depuis deux ans, je suppose grâce aux chats qui sont plus nombreux dans le verger depuis quelque temps. Il m’est arrivé aussi de recevoir la visite de serpents. Des couleuvres, bien gentilles. Croyez bien que je n’ai pas le temps de m’ennuyer.
RYM> Bon je pense que j’ai épuisé mes questions, une dernière remarque, un souhait ?
S> Oui, certains engins mécaniques, débroussailleuse, broyeur, sentent mauvais, et de plus font un bruit très déplaisant. Par chance, ils ne servent pas tous les jours. Je l’ai dit à mon cultivateur ; lui il met un casque anti-bruit, mais il ne fait rien pour nous les arbres. Il s’est contenté de me répondre qu’il cherchait des solutions pour ne plus avoir à utiliser ce genre d’appareils. J’espère qu’il trouvera vite.
RYM> Merci beaucoup M. Orange, et bonne continuation.
RYM, de radio-Arcadia
18/06/2012